Monnaie complémentaire et Revenu Minimum de Dignité

Le principe du RMD.

Rappelons tout d'abord le principe de ce Revenu Minimum de Dignité, ou R.M.D.

Nous avions proposé [cf aussi http://www.blemaire.org/PDF] l'instauration d'un Revenu Minimum de Dignité – que l'on pourrait aussi appeler Revenu d'Appartenance Communautaire – qui attribuerait à chaque adulte de notre communauté nationale l'équivalent du ¼ du PIB national moyen, soit environ 625 euros mensuels, nets d'impôts ou d'autres déductions.

L'objectif de cette allocation universelle est double et signifie que toute collectivité est constituée d'individus, hommes ou femmes, aux talents et aux compétences diverses, mais qui partagent tous le même statut, celui d'appartenance à une même communauté, ce que l'on peut traduire par le principe de non-exclusion.

D'où le premier objectif: démontrer concrètement que tout membre de cette collectivité doit être reconnu en tant que tel, et avoir donc 'droit' à cette reconnaissance. Ce droit, dans une économie essentiellement marchande dans laquelle le travail est de plus en plus spécialisé, et où les individus sont de plus en plus interdépendants, ne peut se concrétiser que par un revenu 'monétaire'. Nous reviendrons sur ce point à l'occasion de notre proposition d'une "monnaie RMD".

Le deuxième objectif, relativement indépendant du premier, est d'améliorer, en cette période de crise, le pouvoir d'achat de tous, et en particulier des plus faibles et des plus démunis, en tentant, de plus, d'orienter ce renouveau de consommation vers des produits 'éthiques', 'bio', respectueux de l'environnement, des conditions sociales de production. Cette orientation va donc plus généralement vers ce qu'il est convenu d'appeler 'développement soutenable', et humaniste.

C'est sur ce point que l'introduction d'une monnaie ad hoc, la "monnaie RMD" va, elle aussi, remplir un double objectif:
a) le financement, partiel ou total, du R.M.D.,
b) et la ré-orientation de la demane 'solvable', et donc de la production, vers cette économie de développement soutenable.

Comment financer le Revenu Minimum de Dignité.
Sans revenir sur les chiffres déjà évoqués,- se reporter aux billets précédents – rappelons que le surcroît net de ressources nécessaires est de l'ordre de 15 milliards d'euros mensuels. Ce chiffre est obtenu en partant de 31 milliards bruts mensuels, desquels on enlève environ 16 milliards de prestations qui n'auraient plus lieu d'être, comme expliqué par ailleurs.

Si l'on considère que la relance de la consommation peut nous faire passer d'une prévision (OCDE) de décroissance de 3% à une croissance de 1% (soit une variation du PIB de 72 milliards – 6 milliards mensuels), on serait ainsi ramené à 9 milliards mensuels.

Mais, plus important encore, - à côté de ce besoin de financement, important certes, mais non insurmontable (puisque de l'ordre de 6 à 10% du PIB, montant déjà annonçé pour le plan Sarkozy, beaucoup plus 'classique' – et qui ne s'attaque pas vraiment au fond du problème- voir un précédent billet – se pose la question de la méthode utilisée pour diffuser ce RMD, ainsi que la façon d'orienter son utilisation.

Une monnaie complémentaire pour financer le RMD
.

Pur ceux qui veulent approfondir le sujet des monnaies complémentaires, je ne peux que conseiller les livres de J. Blanc et de B. Lietaer sur le sujet, ou encore un certain nombre de discussions qui se sont tenues sur le blog de Paul Jorion.
Je me contenterai ici de dire que la monnaie 'RMD' (on peut lui donner tout autre nom, bien sûr) sera une monnaie complémentaire à notre Euro européen. Un 'Euro RMD' aura la même valeur qu'un Euro 'classique', mais aura deux propriétés bien particulières.

Tout d'abord, la quantité émise sera connue à l'avance. Si on finance l'ensemble du RMD (brut ou n et) avec cette monnaie en « Euros RMD », on émettra (le « On » étant l'Etat, ou les collectivités territoriales, déjà chargées du RMI – c'est un point à débattre) 31 milliard (ou 15 milliards) d'Euros RMD par mois. Si on décide que c'est plus commode de procéder par quinzaine, ou par semaine, on ajustera les quantités en conséquence.

Comment distribuer cette monnaie RMD.
Le plus simple me paraît de distribuer à chaque adulte une carte RMD (qui peut ressembler à une carte Vitale, voir être une carte Vitale modifiée, les possibilités techniques sont nombreuses), carte RMD qui serait donc abondée chaque mois, ou chaque quinzaine, ou chaque semaine – suivant la solution retenue – du montant de 'monnaie RMD' prévu.

Pour les enfants, soit on passe par l'intermédiaire des adultes 'tuteurs' de ces enfants, soit on utilise une méthode voisine: là encore, c'est à débattre.

Quelle est la durée de vie de cette monnaie? Là encore, on peut en débattre. On peut ne mettre aucune restriction sur la durée de vie de la monnaie distribuée, soit on peut décider que cette monnaie a une durée de vie limitée, par exemple à quelques mois. Mais ce n'est pas le plus important.

De l'utilisation éthique et 'sociétale' de la monnaie 'RMD'.

De fait, la deuxième propriété de cette monnaie est d'être 'spécialisée', dans le sens suivant.
L'idée de base d'une monnaie spécifique (dans le cas contraire on aurait pu distribuer une carte 'Vitale RMD' libellée directement en euros 'classiques' – au fronçement de sourcil de la BCE et de Bruxelles près) est de permettre d'orienter les dépenses vers ce que la collectivité juge souhaitable.

D'où l'idée complémentaire suivante. Demander aux distributeurs, grossistes, importateurs, producteurs, commerçants d'indiquer, en supplément des codes bar classiques, la 'provenance' des produits (provenance géographique ou 'sociétale' ou 'éthique' ou 'écologique' ou …), par un label 'RMD compatible'.
Les détenteurs de monnaie RMD auraient ainsi un bonus – qui peut être très important -, voire seraient les seuls à pouvoir acheter ces produits 'RMD'.

Quelques exemples pour illustrer ce point.
Supposons qu'un produit quelconque, un jouet par exemple, provienne d'un pays aux conditions sociales jugées contraires à la dignité humaine, mais à un prix de vente affiché très bas. Ce produit n'aurait évidemment pas le label 'RMD'. Un jouet, à l'utilité comparable, mais labellisé RMD – et sans doute proposé plus cher – pourra être acheté au m^me prix, ou à un prix voisin en 'monnaie RMD'. Pour d'autres produits de consommation courante, mais importés, et donc sans concurrence locale possible, comme le café, on peut là encore lablliser 'RMD' les produits dont les conditions de production seraient jugées acceptables sur le plan de la dignité humaine.
Deux autres exemples, orientés 'investissement' ou 'biens durables'. Pour financer l'achat d'une automobile 'écologique', il n'y aurait aucune prime pour les achats en monnaie normale (euro), mais, par exemple, une remise de 30% si le véhicule était payé uniquement en « monnaie RMD ». Même idée pour des travaux d'économie d'énergie, au lieu de faire intervenir des crédits d'impôts toujours délicats à gérer. (ce ne sont que des exemples, bien sûr).

La monnaie RMD est une vraie monnaie.

Pour ceux qui penseraient que la monnaie RMD ne serait pas une vraie monnaie, si elle ne recevait pas l'aval de la BCE ou d''autres autorités internationales, rappelons la définition fondamentale de toute monnaie.
Une monnaie est un « moyen de paiement possédé par X et reconnu comme tel par la communauté à laquelle appartient X »

On peut, de plus, définir les 5 points essentiels pour garantir le bon fonctionnement d'une telle monnaie RMD:
a) Qui émet (Les collectivités territoriales, missionnées par l'Etat)
b) Combien on émet (chaque mois, 9 ou 15 milliards d'euros, ou plutôt d'"euros-RMD", à parité avec l'euro pour faciliter les calculs)
c) Comment on émet (par le biais d'une carte de type 'VITAL' ou 'Moneo', lisible par tout terminal bancaire et toute caisse d'hyper marché, et tout lecteur de carte de commerçant)
d) Pour quoi, pour qui: pour financer le RMD, pour chaque membre de la communauté
e) Qui contrôle: la collectivité, lors de l'émission et le 'renflouement' de chaque carte, au début de chaque mois.

Toujours pour montrer l'impact du RMD et d'une monnaie RMD pour une économie 'humaniste', respectueuse de l'homme et de son environnement, citons enfin une remarque de Philippe Derudder: « [une telle monnaie peut aussi permettre ]l' ouverture simultanée de chantiers d'activités à vocation sociétale permettant la mutation écologique.
[...Ainsi] Ouvrir un vaste champ d'activités sociétales (avec formation rémunérée pour permettre l'utilisation prioritaire de toutes les personnes actuellement exclues, ou marginalisées) conduisant à restaurer "le plein emploi", activités rémunérées en monnaie complémentaire ayant cours légal... 
»

Dans l'attente de suggestions, observations, critiques, B.L.

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