LE RMD: une volonte politique plus qu un probleme d intendance

L'instauration du revenu minimum de dignité: cela dépend essentiellement d'une volonté politique.

625 € chaque mois, net d'impôt, sur le compte de 64.5 millions de Français ! Un demi SMIC égal au quart de notre PIB par habitant. Une allocation universelle rendant caduque la plupart des aides dites ‘sociales’, du RMI au RSA en passant par les allocations familiales ou les aides au logement.

De la faisabilité d'une telle mesure
L'intérêt d'une telle mesure est évident pour tous ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les 625 euros mensuels que nous proposons (deux adultes toucheraient ainsi, à eux deux, 1250 euros) ne sont pas la panacée, mais ce chiffre paraît à la fois possible (il correspond au quart du PIB moyen Français de 2008) et suffisamment utile pour sortir la majorité des exclus de leur misère.

Les personnes concernées.
Tous les français, sans exception : il ne sera ni question, ni nécessaire, de mobiliser une armée d’experts et de conseillers fiscaux pour déterminer si telle personne, compte tenu de N paramètres, a droit à telle ou telle allocation. Chacun y aura droit de sa naissance à sa mort, en tant qu’être humain.

Cette mesure pourra être proposée comme projet ultérieur à l’ensemble de la planète, avec le même principe : le 1/4 du PIB moyen de la communauté concernée. De fait, la France ne peut, à elle seule, assurer un Revenu Minimum de Dignité à l’ensemble du monde. En revanche, elle peut le proposer au monde entier, et a les moyens de le promulguer pour ses 64,5 millions de ressortissants. Voilà une première grande piste d’action, très concrète, et qui ne demande "que" de la bonne volonté pour être rapidement appliqué.

La période de transition
De nombreuses allocations aux personnes, et plus encore de subventions aux associations, aux organismes, aux collectivités, aux entreprises, ont pour objectif de venir en aide, directe ou indirecte, à une multitude de cas particuliers. L’énergie consommée à cet effet est considérable, sans que l’efficacité de l’ensemble de ces mesures soit réellement démontrée.

L’Etat s’occupe, directement ou indirectement, de redistribuer plus de 50% de la richesse nationale. Faisons déjà en sorte que l’état commence par redistribuer efficacement 22% (ce serait 25% si les enfants touchaient le même ‘RMD’ que les adultes) du revenu national, ou plus exactement du PIB.

A côté du RMD adulte – pour les personnes de plus de 18 ans – le RMD ‘jeune’ tiendra compte de l’âge de la personne concernée, et sera, en moyenne, la moitié du RMD ‘adulte’. Plus précisément, il représentera le 1/18 du RMD adulte par année (à 5 ans, 5/18, à 13 ans, 13/ 18 …). Pour un couple qui aurait deux enfants de 7 et 11 ans, le RMD ‘familial’ serait ainsi de 1875 euros, nets d'impôts. Les moins de 18 ans représentant 20% de la population, cela signifie que les besoins de financement ‘bruts’ de ce RMD seront de l’ordre de 22% du PIB, et non de 25%.

Qui y gagne, qui y perd (les valeurs ont été calculées en euros 2008)?
Certains pourront paraître désavantagés, en particulier ceux qui cumulent déjà diverses allocations sociales. Le RMIste célibataire, avec ses 448 euros mensuels, s'il touche par ailleurs 200 euros d'autres allocations, pourrait sembler y perdre. Mais un couple de RMIstes touchera 1250 euros - au lieu de 672 actuellement, ses éventuels autres allocations ne couvrant sûrement pas la différence. De plus, le RMIiste ou l’allocataire ASSEDIC de longue durée ne sera plus dissuadé de rechercher un travail qui lui plairait, mais qui lui ferait perdre son RMI. Ce seul fait risque de changer totalement la donne du chômage, et rendra caduque la loi sur le RSA.

Parmi les autres gagnants, citons les couples de personnes âgées, qui ne bénéficieraient que du minimum vieillesse, 1135 pour un couple.

Combien de temps pour cela ?
L’instauration du RMD peut être totale à l’intérieur d’une même législature. La première année seraient concernés en priorité tous les individus sans travail qui, s’ils sont seuls, perçoivent moins que le RMD, ou, s’ils sont en couple, perçoivent moins de 2 fois le RMD (même règle pour les familles, en tenant compte du nombre de personnes à charge). Eradiquer la misère des sans emplois en un an est donc possible (sans même tenir compte du fait que la relance du pouvoir d’achat devrait faire diminuer de façon sensible le chômage).

En moins de trois ans, en étendant le RMD à l’ensemble de la population, la misère la plus sordide devrait être complètement éradiquée de notre pays.

Les raisons de l’universalité" du RMD
Certains peuvent trouver choquant qu'un Rockfeller puisse prétendre au même RMD qu'un SDF. Il nous semble pourtant essentiel à la dignité de chacun que ce RMD soit attribué à tous, un peu comme pour la blouse grise "standard" de nos écoliers de 1900. Ce RMD est simplement un signe ‘extérieur’ d’appartenance à une communauté, la communauté des français. Si ce RMD n’est pas versé à toute personne ayant la nationalité française, d’un héritier Bettencourt à un chômeur en fin de droit, il perd tout son sens. Mais ce peut être l’occasion de demander aux bi-nationaux, nombreux semble t-il en France, de choisir à leur majorité (18 ans), avant donc de pouvoir percevoir le RMD adulte.

Droit(s) et devoir(s) du récipiendaire du RMD.

Ce revenu ‘communautaire’ correspond au droit de tout membre de la communauté, dès lors que la personne concernée se sent réellement membre de cette communauté : ce sentiment d’appartenance se concrétisera donc de deux façons :
En ‘droit’, la perception de ce revenu,
en ‘devoir’, le fait de consacrer bénévolement une ou deux heures par semaine – en fonction de ses capacités - à une activité d’intérêt général, si possible non couverte par des travaux de type ‘marchand’.
De fait, même si un Rosanvallon s’opposait dès 1994 à toute allocation universelle en affirmant que le seul facteur d’intégration sociale était l’accès au travail, nous prétendons pour notre part que, à côté du seul fait de pouvoir vivre ‘correctement’ – aussi modestement soit-il – le fait de participer à une activité commune, et utile, est déjà un facteur de reconstruction de sa propre dignité non négligeable, qui n’a nul besoin d’être marchandisé, ou marchandisable (De nouvelles pistes pour les activités humaines)

Comment financer ce RMD.
Les besoins nets de ce financement, compte tenu des économies réalisées sur les allocations qui seraient de facto supprimées, seraient de l’ordre de 10% du PIB (195 milliards d’euros pour une année pleine, avec les chiffres de 2008). Mais même ces 10% semblent être une hypothèse ‘haute’, un chiffre de 8,5% du PIB nous semblant plus réaliste, du seul fait qu’un pouvoir d’achat minimum ainsi assuré, une croissance supplémentaire de 3% (correspondant à des rentrées pour l’état de 1,5%) en étant une conséquence quasiment automatique.

Trois pistes nous semblent spécialement prometteuses pour ces besoins de financement.
a)un impôt sur le capital, avec un taux voisin de 2% (le capital représentant lui-même quatre fois le PIB) suffirait presque, à lui tout seul, pour couvrir ces besoins.
b)Un moratoire sur le remboursement des dettes publiques (principal plus intérêts) suffirait lui aussi pour couvrir ces besoins. Si le moratoire ne portait que sur les intérêts de la dette publique, on couvrirait déjà la moitié des besoins de financement du RMD.
c)Une monnaie complémentaire, essentiellement scripturale, pourrait aussi être émise pour couvrir tout ou partie des besoins correspondant. L’émission pourrait se concrétiser de diverses façons, dont celle de la distribution d’une carte inter-bancaire rechargée chaque mois du montant du RMD.
Ainsi, quelles que soient les modalités de financement, l’instauration de ce RMD, à la fois utile, efficace, et crédible – donc pertinente – s’inscrit totalement – en tant que point 3 - dans un projet national de société correspondant à :1) une société où le mérite individuel est récompensé, 2) dans un cadre déterminé et contrôlé par la puissance publique, 3) la solidarité entre ses membres étant réalisée par un minimum vital assuré pour tous.

Quelques précisions sur l’universalité et le financement du RMD.

1) A propos de son universalité : parmi les droits et les devoirs, il y a aussi la notion de choix. D’aucuns peuvent refuser, par esprit de caste, d’en bénéficier. D’autres, encore, peuvent refuser les devoirs qui y correspondraient (en particulier le fait de consacrer une heure ou deux de son temps à des activités bénévoles d’intérêt général, ou l’interdiction de tout travail « au noir »). Ce peut aussi être l’occasion de demander aux bi-nationaux, nombreux semble t-il en France, de décider à leur majorité (18 ans) s’ils se sentent, ou non, français à ‘part entière’ : auquel cas ils percevraient de plein droit – et en conscience - le RMD adulte.
2) A propos de son besoin de financement : Les besoins nets de financement ont été estimés à 8.5% du PIB (à partir de besoins bruts de 22%). Si l’on estime à 5 millions le nombre de bi-nationaux (soit, en équivalent ‘adulte’ 3,5 millions, la proportion de jeunes étant plus importante dans cette catégorie que dans l’ensemble de la population française), et en supposant que 2 millions de bi-nationaux choisiraient, à l’occasion du RMD, la seule nationalité française, les besoins nets de financement ne seraient plus que de l’ordre de 7,5% du PIB.

Dans l’absence d’une réforme complète de la fiscalité française – indispensable mais qui dépasse le cadre de ce billet - la piste d’imposition sur le capital ne sera pas conservée.

Nous suggérons donc de nous appuyer simultanément sur les deux autres pistes déjà évoquées :
a) un moratoire – ou une suppression totale – des intérêts de la dette publique due aux résidents (soit 1/3 du montant total des intérêts dus). Le montant net des besoins de 145 milliards se réduirait ainsi de 25 milliards, d’où un besoin restant de 120 milliards
b) l’émission annuelle d’une monnaie « euro-sol » ou « franc sol » ou « euro – national » ou « euro-RMD » de 96 milliards (soit 8 milliards par mois). L’idée d’une monnaie n’ayant une durée de vie de quelques mois (donc très orientée consommation finale), et/ou d’une monnaie ‘fondante’ (à la Gesell) et/ou d’une monnaie ne pouvant acheter que des biens précis (fabriqués ‘nationalement’) peut aussi être creusée.
c) pour le solde net restant à trouver, à savoir environ 25 milliards d’euros, on peut creuser l’idée que les importateurs de biens ne recouvrent qu’une partie de la TVA acquittée, voire qu’il n’y ait pas de récupération du tout. Cette TVA ‘importée’ correspondant à 45 milliards, cela nous laisse un certain volant de manœuvre, d’autant plus que, contrairement à une modification éventuelle des droits de douane, cela ne semble pas exiger l’accord de la commission européenne.

Précisons que toutes ces mesures peuvent être prises de façon totalement interne, si la volonté politique de les instaurer existe : l’intendance suivrait. Pour aller plus loin, et pour instaurer le « 100% monnaie », et/ou une monnaie remplaçant partiellement ou totalement l’euro, d’autres mesures seraient évidemment à envisager, avec des avantages plus grands sans doute, mais des risques plus importants aussi.

Commentaires

  1. Bonjour Bruno,

    Pour répondre à ta question sur le blog de l'extrémiste réactionnaire gdm... :)

    Les axiomes classiques

    Unité de Compte
    Intermédiaire d'échange
    Réserve de valeur

    Sont incohérents. En effet rien ne peut-être une "réserve de valeur", la valeur est toujours relative et change dans le temps, ainsi que selon l'individu qui l'estime.

    Ce qui fait qu'il faut définir la monnaie selon les trois libertés qu'elle doit permettre :

    1) Liberté d'accès aux ressources
    2) Liberté de produire
    3) Liberté d'échanger dans la monnaie

    Ces trois axiomes, sont la base même de la Théorie Relative de la Monnaie, et permettent de DEMONTRER le Dividende Universel, et d'en CALCULER le montant (pas la valeur, ce qui n'a aucun sens) en respectant la liberté des hommes à partir de leur espérance de vie.

    http://wiki.creationmonetaire.info

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  2. Bonjour Stephane,

    en fait gdm est effectivement assez 'particulier'.

    Sur la question monétaire, je pense que la notion de 'réserve de valeur' est essentiellement relative.

    Par ailleurs, et plus généralement, m^me le fondement de la monnaie est relatif. Une monnaie existe dans un contexte particulier, elle s'appuie sur une acceptation toujours contingente, qui peut reposer sur des contraintes légales ou sur une croyance plus ou moins fondée en sa pérennité.

    Lorsque le fondement de cette monnaie est remis en question par une proportion croissante de la collectivité qui l'acceptait jusqu'alors, la situation peut fort bien se dégrader.


    C'est pour cela que j'avais cité le cas de la Grèce, et de sa position vis à vis de l'euro. La Grèce et les grecs considèrent-ils encore que l'euro est la 'bonne' monnaie pour eux, et que ce que leur demandent les 'autorités' internationales et le FMI reste 'acceptable'? L'avenir nous le dira.

    B.L.

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  3. Bonjour, je découvre récemment vos propositions. Je n'ai pas encore d'avis sur celles ci mais il est très intéressant de ne pas se borner au constat des graves problèmes actuels.

    J’apprécie de voir que des propositions émergent de la critiques de failles dont la perception se répand.

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